Guinée : L'armée restera-t-elle fidèle à Mamadi Doumbouya ?
Depuis son accession au pouvoir, le président de la transition, Mamadi Doumbouya, a initié des réformes profondes au sein de l'armée, en consolidant en priorité les forces spéciales. Toutefois, cette stratégie pourrait fragiliser l'équilibre déjà délicat au sein de l'institution militaire guinéenne. Plongée dans l'univers sécuritaire de la Guinée.
Une attaque mystérieuse secoue Conakry
Le 26 septembre, la journée avait commencé paisiblement avant qu'une fusillade éclate en plein centre-ville de Conakry, près du palais présidentiel. Une dizaine d'hommes armés s'en sont pris à des membres des forces spéciales (GFS). Rapidement, les garnisons de Kaloum ont été mobilisées et les forces spéciales ont investi les rues pour rétablir l'ordre, créant une panique dans la capitale. Des fouilles ont été menées dans plusieurs quartiers environnants, et la psychose a gagné la ville. Le gouvernement a, plus tard, démenti ces événements, évoquant des rumeurs infondées.
Questions autour de l'incident et de la loyauté militaire
L'altercation du 26 septembre a suscité de nombreuses interrogations. S'agissait-il d'une confrontation entre proches du président issus des forces spéciales ? Ou était-ce une réponse à la mort mystérieuse du colonel Célestin Bilivogui, disparu après son arrestation ? Les spéculations vont bon train, mais rien n'est confirmé.
L'évasion de Dadis et Pivi : un tournant pour le régime
L'évasion spectaculaire, le 4 novembre 2023, de Moussa Dadis Camara et de ses coaccusés a mis le régime de Doumbouya en difficulté. Bien que tous aient été rapidement capturés, Claude Pivi, alias Koplan, a réussi à s'enfuir jusqu'en Guinée forestière. Cette évasion a soulevé des questions sur la sécurité du pays et sur les complicités internes au sein de l'armée et des forces de sécurité.
Tensions internes dans l'armée guinéenne
L'atmosphère tendue au sein de la junte s'est accentuée avec le limogeage de Sadiba Koulibaly, ancien chef d’état-major des armées. Ce dernier, autrefois proche de Doumbouya, a été accusé de désertion et emprisonné. Sa mort en détention en juin 2024, officiellement due à un arrêt cardiaque, a ravivé les soupçons et la méfiance au sein de l'armée.
Une armée fragmentée et des forces spéciales favorisées
Mamadi Doumbouya a fait le choix stratégique de renforcer les forces spéciales, son principal appui militaire, au détriment des autres unités de l'armée. Cette unité d’élite, en constante expansion, bénéficie d’un équipement supérieur, ce qui pourrait exacerber les frustrations parmi les autres corps de l’armée, notamment le Bataillon autonome des troupes aéroportées (Bata) et la gendarmerie.
Un soutien stratégique des hauts gradés
Pour maintenir son pouvoir, Doumbouya s’appuie sur des piliers du régime, tels que le ministre de la Défense, Aboubacar Sidiki Camara, et le général Balla Samoura. Ces hommes influents jouent un rôle central dans la gestion des forces armées et assurent une certaine stabilité malgré les tensions croissantes.
Le défi de maintenir la cohésion dans l'armée
Malgré ses efforts pour unifier les différentes forces sous son commandement, notamment en standardisant les uniformes et en assurant le paiement régulier des salaires, Doumbouya fait face à un défi de taille : maintenir la loyauté de l’ensemble de l’armée alors que les forces spéciales prennent de plus en plus d’importance.
Un avenir incertain pour le régime de Doumbouya
Alors que le régime célèbre son troisième anniversaire, la question de la fidélité de l’armée envers Mamadi Doumbouya demeure ouverte. La montée en puissance des forces spéciales pourrait bien constituer un atout pour son maintien au pouvoir, mais pourrait aussi, à terme, menacer l’équilibre déjà fragile de l’armée guinéenne.